Vous avez décidé de vous mettre au jogging. Bien sûr, vous installez une application d’entraînement sur votre cellulaire. Vous n’êtes plus qu’à un clic du téléchargement. « En cochant la case J’accepte les présentes conditions, vous confirmez avoir lu (…) ». Moment d’hésitation. Il faudrait tout de même les lire. Et puis zut. Les caractères sont minuscules et le texte fait plusieurs dizaines de pages. Clic, vous acceptez. À quoi avez-vous consenti au juste ?
C’est ce qu’a exploré une étude (à paraître) menée par Carl Mörch, chercheur en psychologie, qui s’intéresse au développement responsable des technologies dans la société et en santé. Son étude a ceci de particulier qu’elle adopte le point de vue de l’usager. Son objectif est d’examiner les informations relatives à l’éthique fournies par les dix applications de santé (Health & Fitness) gratuites les plus téléchargées sur la boutique Google Play Store aux États-Unis.
On peut parler d’une véritable prolifération d’applications mobiles liées à la santé. À l’automne 2019, on pouvait en compter 37 143 dans la boutique de Google. Forme physique, sommeil, santé mentale, et nutrition font vendre. La popularité de ces applis n’est pourtant pas garante de leur qualité.
Un langage obscur
Les dix applications étudiées donnaient accès à pas moins de 14 documents! Toujours rédigées dans un langage juridique, les conditions générales d'utilisation (CGU) font l'objet de nombreuses critiques. Elles sont même qualifiées du « plus gros mensonge sur Internet », car leur opacité fait que ces textes sont carrément ignorés par les utilisateurs. Une lecture attentive de ces textes nous permettrait-elle vraiment de comprendre à quoi on s’engage? Carl Mörch ne le croit pas.
Certains avanceront qu’il suffit de consulter le site du développeur pour avoir accès à des informations complètes et digestes. Ce n′est hélas! qu′un vœu pieux. Les conditions d’utilisation étant déjà ignorées par les utilisateurs, qui sera assez scrupuleux pour se donner la peine de lire ces nouveaux textes – si tant est qu’ils apportent plus d’information?
Deux problèmes éthiques de fond
On peut présumer que les utilisateurs sont plus ou moins conscients que le téléchargement d’une application privée, gratuite de surcroît, implique une forme de monétarisation. Les structures privées développent une application en poursuivant un but lucratif. Pourtant, quand on lit les textes fournis par ces applis, les modèles d’affaires sont peu – ou pas – expliqués. De plus, l’utilisation qui sera faite de vos données personnelles reste floue : « Vos informations seront données à des services tiers ou à des partenaires (…) ».
Une autre question éthique de taille est celle de l’efficacité de ces applications. Leur conception est-elle basée sur des données scientifiques? Leur efficacité est-elle réelle? Réponse de Carl Mörch.
Les pistes de solution
Les plateformes de vente d’applications (Google et Apple) ont certes un rôle à jouer : ils devraient être plus exigeants avec les concepteurs d'applications en matière d’éthique. Sans légiférer, les gouvernements peuvent aussi s’en mêler. C’est d’ailleurs ce qu’a fait le gouvernement britannique qui a lancé une initiative novatrice, comme l’explique Carl Mörch en conclusion.
Pour contacter Carl Mörch :
carl.morch@umontreal.ca
Catherine Hébert
Rédactrice scientifique
catherine.hebert.6@umontreal.ca
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